"Mémoire d'Opale", l'histoire des ports de la Côte d'Opale
"Boulogne-sur-Mer"
Boulogne, c’est avant tout un port.
Nul ne peut oublier le passé,
il a forgé son histoire.
Des hommes, des femmes ont sans cesse travaillé
à le reconstruire, sans ménager leurs efforts
bien avant l’an 1000.
Toujours en gardant l’espoir.
Qu’ils soient empereurs, rois ou tyrans,
leurs empreintes sont gravées dans la pierre.
Leurs rêves et leur folie ont résisté au temps.
Britannique ou germanique,
l’envahisseur tyrannique
a porté des générations de Boulonnais en terre.
Boulogne, la fière, la battante.
Boulogne, la résistante.
Remparts et cathédrale ont gardé sa mémoire.
La course au pouvoir
et l’avidité
n’ont pas eu raison de cette cité !
Poisson roi
Tu débordes dans les cales.
Tu nourris Paris et ses halles.
Dans le noir et le froid,
nos marins ont gardé la foi.
Le sel de la mer
c’est le sel de la vie.
Il nous garde en vie.
On le vénère.
On le garde près de nous,
comme le corps de nos époux.
L’appel du grand large
est plus fort que la tempête,
plus fort que ma barge,
plus fort que toutes les raisons de la Terre.
Et je m’entête
et j’en suis fier
à prendre la mer
en bravant tous ses mystères.
“ César ”
Cette mer d’Opale
portera mes vaisseaux.
Cette belle rebelle
aux reflets argentés,
je la dominerai.
Qu’importe la colère des eaux
l’heure du combat a sonné.
Navires à l’horizon
se dessinent à grands traits.
Ma flotte va de l’avant.
Mes rêves sont si grands.
A tort ou à raison,
Je veux la fière Albion.
Gésoriacum la romaine
mes cohortes ont couvert ce pays.
Un pont jeté vers cette île lointaine.
Morins,
vous luttez en vain,
mon empire est ici !
Je suis empereur des romains,
la Gaule est ma conquête,
ma fierté et mon chemin
vers la gloire !
Mon entrée dans l’Histoire !
Demain, sera un jour de fête.
Une victoire bientôt me couronnera.
Cette île sera mienne
et romaine.
Légionnaires ! Que ma volonté soit faite !
Rien ne pourra
contrarier ma joie !
"Godefroy"
Notre-Dame, Vierge nautonière,
souvent je pense à toi, loin de ma cité !
Tous les rois s’inclineront pour une prière
devant ta majesté !
Tu brilles dans nos cœurs
tel l’oripeau
sur le dos
de tes serviteurs.
Des oriflammes
flottent sur les murailles
de nos châteaux.
J’ai la force des chevaux,
J’ai la foi des croisés,
Je trancherai
le cou des Sarrasins,
au nom de tous les saints.
Mon cœur s’enflamme,
je sens au fond de mes entrailles
battre en moi, au milieu de la nuit,
le cœur de mes ennemis.
Comtesse Ide
ma mère,
Je pars en croisade pour Jérusalem,
priez pour moi qui vous aime.
La route est longue sur terre et en mer.
Dieu soit mon guide !
Je voudrais percer
le secret
des nuages,
le langage
des étoiles.
Je voudrais lire
lire mon avenir
avant…. de mourir.
Je suis animé d’un esprit de justice et de paix
comme vous, je le sais.
Ils sont nombreux,
ils sont cruels
les infidèles.
Avec mon épée
dans ce pays à évangéliser,
j’emporte avec moi
mon amour de vous et ma foi.
“ La Guerre de 100 ans ”
On se souviendra longtemps
des six bourgeois.
La corde au cou, les pieds nus,
ils se sont rendus
à l’Anglais,
pour sauver
l’habitant.
Les six bourgeois de Calais,
leur noble sacrifice
en bronze,
par Rodin
a été immortalisé.
Elle a fait des ravages
le long de nos plages.
Longue et cruelle
presque éternelle
fut la guerre de cent ans.
Oubliées les intrigues, les villes assiégées.
Les soudards désarmés
ont fini
de piller.
Les Anglais
sont partis.
Manants
et nobles gens
ont retrouvé
la paix.
Avant les pourparlers
qui ont conduit à la paix,
que du malheur,
que des horreurs
vécues pour rien,
ont déchiré en vain
tout un pays.
Séparés de leur familles, ce sont les innocents
qui paient toujours
un lourd
tribut… à l’ennemi.
On se souviendra
du courageux mayeur boulonnais
et des bourgeois téméraires
qui refusèrent de capituler,
d’une seule voix
face au roi d’Angleterre.
“ Bucaille ”
Hardis compagnons !
voyez l’anglais, maître des mers,
notre ennemi héréditaire.
Nous allons couvrir de sang
le gaillard d’avant
de leur ponton.
Pour l’or et les bijoux,
aussi chers à nos yeux
que les épices, le vin et le thé,
Corsaires soyez prêts !
Ce butin n’est pas pour eux.
On file, on file vers l’aventure !
Hauts les cœurs, hauts les cœurs !
En gonflant toute la voilure
on passe à l’abordage dans une clameur.
Fiers, fiers sont les matelots !
Aux quatre points cardinaux !
Sur notre voilier porté par le vent.
Mais il est si grand l’océan,
que parfois je me demande si demain,
il y aura… un lendemain.
Redoutés, adulés,
vers notre destinée
nous filons.
Bucaille ou Jean Bart,
nous sommes les rois de la course,
avides de fortune et de gloire,
sur ordre nous pillons, nous sabordons
sous le regard de la Grande Ourse.
Le ciel est notre guide.
L’horizon trace des sillons
pour regagner la côte.
Aussi loin que possible nous irons,
portés par les vagues les plus hautes,
mais c’est le vent ici qui décide !
“ Napoléon ”
Mes rêves de bonheur, d’amour et de paix
s’éveillent quand Joséphine me sourit.
Je garde le parfum de ses baisers
jusqu’au fond de mon lit.
Mes rêves de conquête sont des rêves de liberté
et d’égalité.
Ils forgeront mon empire.
Grognards, appelez-moi sire !
Jour et nuit
j’écris
pour donner à la France
éclat et puissance.
Je trace des plans pour franchir la Manche.
Destination l’Angleterre pour la revanche !
Nelson nous a défiés,
par deux fois humiliés.
Lattouche-Tréville lui a fait
mettre pied à terre,
entrevoir les portes de l’enfer.
Fallait pas nous livrer bataille,
Angleterre, ta marine est prise en tenaille.
Tout est prêt.
A mon signal
l’invasion peut commencer.
Mais où est Villeneuve, mon amiral ?
Le temps s’écoule si vite en guerre.
La menace pèse déjà
aux frontières.
Je me sens si las.
Une nouvelle coalition s’est encore formée,
mais je reviendrai !
“ Je suis un marin en sursis ”
Maîtresse peu fidèle
la mer peut être mortelle.
Dans cette profonde nuit austère
sous un ciel en colère,
je cherche ma bonne étoile,
je te salue Marie en hissant les voiles !
Sainte Vierge, dis-moi comment vaincre ma peur ?
Je sens la présence des armées de la mort.
Au secours, j’ai besoin de renfort.
Dis-moi si j’avais raison de croire
en cet empereur aux rêves de grandeur.
La mer comme un grand miroir
me renvoie le masque de la peur.
Cornes de brume
font frissonner les âmes.
C’est un appel du ciel
pour des voyages lointains.
Sous ce dôme étoilé
au milieu des bateaux qui s’enflamment,
j’attendrai
un signe du ciel
jusqu’au petit matin.
J’aimerais revoir Muriel.
Esclave du vent et
des fureurs de la mer,
je sens mon corps glacé.
La peur embrume mes pensées.
je ne suis pas très fier
sur cette frêle embarcation.
Comme une lame de fond,
le parfum des embruns
emporte mon chagrin.
Pourquoi tout ce sang sur le pont
et sur mon cou ?
Une vague de dégoût
fait chavirer et mon cœur et ma raison !
Pourquoi cette folie meurtrière
sur une mer en colère ?
Non, la mer n’est pas belle.
Elle est cruelle quand elle
nous arrache à ceux qu’on aime.
Sur le champ de ma douleur
où ma raison s’égare,
mon heure
est arrivée.
Je t’aime !
Après tant de fureur et de sang,
j’ai souvent vu l’ombre de la mort.
Mais dans mon cœur bat
encore la vie.
Seul face à l’océan,
Ici bas,
je suis un marin en sursis
que la mort
appelle à cor et à cris.
“ Mariette Pacha ”
Tu étais grand,
tu étais fort
comme un lion.
Successeur de Champollion,
tu as rendu à l’Egypte
son trésor,
son passé glorieux
sans jamais oublier
la ville qui t’a vu naître.
De tes chantiers
sont sorties
tombes et momies.
De ta plume s’est joué
Aïda,
magnifique opéra.
Tu t’appelles Mariette.
Un enfant du pays
à qui l’aventure a souri.
Répondants et amulettes
étaient ta raison d’être.
Auguste tu l’étais,
dans ce sable que tu creusais
pendant tes fouilles lointaines
pour révéler l’Egypte ancienne.
Elles sont belles et mystérieuses
ces pyramides qui touchent le ciel.
Elles sont majestueuses
et parfois tueuses.
Reines et rois
combien de fois
leurs sépultures antiques
aux trésors mirifiques
t’ont dévoilé
leurs secrets.
“ 1900 ”
Sous cette ombrelle
tu es la plus belle,
effrontément la plus belle,
un astre qui brille dans le noir.
Elle couvre ton visage
là, sur cette plage,
à l’aube de notre histoire.
Arrête de me fuir.
Laisse ton parfum m’envahir,
comme une habitude.
Pour moi est venue l’heure.
Ouvre-moi ton cœur,
et brise… ma solitude !
Train à vapeur et tramway,
Boulogne tu resplendis.
La belle société
se plaît
à venir ici.
Ta plage a tant de vertus
et moi je n’ai pas encore tout vu.
C’est le temps des bains de mer,
des traversées sur les steamers
pour gagner l’Angleterre.
Tout est bleu autour de moi,
ma vraie richesse est-ce toi ?
Dis-moi
si je dois croire en ton amour.
Dis-moi
si tu m’aimeras pour toujours.
Au milieu de tous ces notables,
quand je vois ton corps
ruisselant de bijoux et d’or
onduler sur le sable,
je sens brûler en moi
un feu de joie.
“ 14-18 ”
Armée allemande,
Casques à pointe et uniformes rutilants.
La guerre de tranchée s’est creusée.
De boue et de sang
mes cauchemars sont hantés.
Mes nuits sont peuplées
d’ombres obsédantes.
Oubliés bals, concerts et bains iodés.
Chaque jour, c’est la vie
qu’on essaie de garder.
Ailleurs, c’est comme ici.
Terreur, terreur, malheur !
Mon pays a mal en plein cœur !
Il porte un habit de douleur.
Je voudrais le consoler,
lui redonner le courage d’espérer.
Voyez ce matin gris,
sa tristesse et sa mine défaite.
Comment ne pas hériter de sa monotonie.
Comment ne pas penser à la défaite.
De la pluie je n’attends que les couleurs de l‘arc-en-ciel,
de la mitraille je n’attends que le silence d’une mort éternelle.
Je ne peux pas panser toutes les blessures
de cette horrible guerre,
c’est sûr.
Quand cessera ce vacarme sur terre ?
Il faut que la raison l’emporte sur l’horreur….
Je voudrais sortir du fracas des obus,
de la faim, de la peur,
trouver une issue.
Ne pas faiblir,
Ne pas faillir.
Rester droit, aller de l’avant.
Rester en vie tout simplement !
S’opposer à l’oppresseur.
A l’unisson,
clamer sans peur
notre détermination.
“ La lettre amoureuse ”
Pourquoi cherches-tu la mort ?
J’attends tout de toi et tu pars !
J’ai le cœur trop plein d’amour.
Un cœur lourd
comme une valise sur le départ.
Que vaut ma vie en partage à tes yeux ?
Dis-moi ce que tu veux ?
Ne pars pas d’ici,
ce combat n’est pas le tien.
Mon amour vaut bien
celui de la patrie.
Ton absence me laisse vide,
abandonnée, triste et livide.
Mes larmes ont-elles moins de prix
que le sang de tes ennemis.
Regarde-moi
Je suis prête à engager ce combat !
L’aiguille du cadran
marque le temps qui passe,
inexorablement.
Ne me demande pas de t’aimer
au-dessus de mes moyens.
Je suis une femme
en désespoir
qui recherche une flamme,
juste une lueur d’espoir.
“ Dans les tranchées ”
Dans ce trou béant,
J’ouvre les pages
de ma vie, en grand.
Je dessine ton visage.
Je relis tout haut
ces mots
qui me consolaient
et auxquels je m’accroche désormais.
Dans ce trou béant,
il n’y a pas d’avenir,
qu’un simple espoir
de te revoir.
Il n’existe que le présent,
et ton pâle souvenir.
Seul, je reste seul,
avec mes camarades… morts
et mes idées noires.
Je voudrais entendre ta voix
me dire de revenir.
Je voudrais t’entendre
me dire des mots tendres.
Dans ce trou béant,
il n’y a que le feu et le sang,
la mitraille
et la faim qui me tenaille.
Le froid et la pluie
qui me transpercent la peau.
Je vais finir ici
entre ciel et caniveau.
J’aurais tant aimé
revoir un peu de ciel bleu, de soleil
J’aurais tant aimé
un peu de paix avant le grand sommeil.
J’aurais tant aimé
entendre le son d’une rivière
le chant des oiseaux et celui de la mer.
"39-45"
Amour de bord de mer
a ce matin un goût amer.
Demain, je prends le large
sur une barge.
En pointillé dans ta vie,
je chercherai ma place.
Pour oublier la guerre d’ici,
ton amour sera mon audace,
ma force, ma raison d’être,
mon espoir peut-être.
Vibrer,
aimer,
rêver,
il n’y a que ça de vrai !
Sur la pointe des pieds
elle s’est dressée,
sur mon visage mal rasé
a déposé un baiser
et puis... s’en est allée.
Que la lumière efface la nuit,
que la nuit m’accorde le répit,
m’apporte le pardon et le réconfort
pour ceux qui, sur ce port,
m’ont arraché l’amour de ma vie.
Qu’enfin la paix vaille plus que la mort,
qu’un chant d’amour trouve sa place
dans le cœur de chacun.
Que Dieu lui prête vie, force et audace.
Que dans nos rêves nous ne soyons plus qu’un !
La nuit soupirante
me renvoie ton image.
J’écoute la respiration de la mer si sage
et je retiens mon souffle dans la tourmente.
“ Guerre ”
Une guerre n’a pas suffi.
Les hommes n’ont pas fini
de regarder le ciel torturé,
de pleurer leurs amours déchirées,
de tuer
dans la haine
et la peine.
Laissez-moi briser les chaînes,
exhorter l’amour plutôt que la haine,
embrasser cette terre
qui m’a vue naître,
et où je vais disparaître,
humble et solitaire.
Ce n’est pas mon destin !
J’attends un signe
qui me délivrera enfin
avant d’entrer digne
dans le silence des pierres
et des cathédrales de lumière.
Est-ce une punition, mon fardeau ?
Ma viea échoué,
sur lebord d’un cours d’eau.
Je voudrais m’envoler
comme l’oiseau,
planer au-dessus des flots
et gagner
ma liberté !
“ Déportation ”
Pour eux, la vie s’enflamme
dans ce long train sans fin,
dans ces rames
des monstres de l’enfer.
Déjà morts de peur et de faim,
Ils ont croisé les suppôts de Lucifer.
Des visages tristes par milliers.
Epoux et enfants séparés.
La mort en forme d’étoile
accrochée sur le cœur,
va emporter avant l’heure
des familles innocentes
victimes d’un fou de guerre.
Pauvre humanité !
qu’as-tu fait ?
Affamés, décharnés,
réduits en poussière.
Pauvre humanité !
Ces charniers sont
l’œuvre d’un démon.
Pauvre humanité !
Pour l’éternité
Convois inhumains
sans lendemain.
Familles effacées
du tableau de la vie.
Vies déchirées,
Mémoire jaunie
n’oublie jamais
les enfants sacrifiés.
Charniers, charniers,
Ces mots me font trembler.
La triste vérité.
Et toujours ces mêmes visages décharnés,
ces trains sans retour.
Dans ma tête encore et toujours.
“ La mer ”
Hommes et femmes,
ouvrières et pêcheurs
sont au labeur.
Sur la mer ou dans le port
sont aussi forts.
De belles âmes
qui se fiancent et puis meurent.
Des rires et des pleurs
tracent les sillons
d’une vie de dévotion.
Marie, tu connais le prix de la vie.
Marie protège nos maris.
Nos prières s’élèvent vers ce calvaire
qui raconte nos morts
à la sortiedu port.
Marie, protège tes enfants,
partis par grand vent,
pour une longue marée solitaire.
Premier port de pêche.
Mon bateau file sur l’eau
comme une flèche.
Zabelle, quand tu chantes l’espoir,
C’est Boulogne qui trouve sa voix.
Tu tournes les pages de notre histoire,
belle et mouvementée à la fois.
La mer toujours belle,
la mer qui se rebelle.
La mer, difficile à dompter.
Abîmes de l’enfer
ou havre de paix.
Que de romans,
de grands
voyages imaginaires.
La mer,
ce grand mystère.
FIN